Fidèle à son attachement aux artistes de l’Ecole de Pont-Aven et de l'entourage de Paul Gauguin, la galerie Malingue présente au printemps 2019 une exposition consacrée à l'œuvre trop méconnu de Charles Filiger (1863-1928).
Pour la première fois depuis près de 30 ans un large panorama de la production de cet artiste rare sera offert aux amateurs et curieux (dernière exposition Filiger en 1990, au Musée d’Art Moderne de Strasbourg, et en 2006, à Quimper, une exposition explorait spécifiquement les rapports d'André Breton avec l'œuvre de Filiger).
Près de 80 œuvres de Filiger seront exposées – y compris les publications qu'il illustre – provenant de collections privées et de musées (Albi, Quimper, Brest, Saint-Germain-en-Laye) dont le magnifique Jugement dernier de la collection Josefowitz, conservé à l'Indianapolis Museum of Art.
Grâce à André Breton, l'œuvre de Filiger est redécouverte, à la fin des années 40, à la faveur de l’exposition Gaugin et ses amis organisée par Maurice Malingue, – père de Daniel Malingue – à la Galerie Kléber. Aujourd’hui, Daniel Malingue et sa fille Eléonore présentent cette exposition, réunissant trois générations autour d’une passion partagée.
Associé au mouvement symboliste, Charles Filiger côtoie Gauguin au Pouldu en 1889-1890 et choisit avec lui la synthèse et la stylisation des formes après une première courte production d'œuvres pointillistes. Il développe ainsi un style tout personnel dans des petits paysages de Bretagne ou des scènes d'inspiration religieuse, nourries de sa passion pour les Primitifs italiens. Il aurait ainsi déclaré à Gauguin après avoir contemplé ses toiles : "Vous êtes Gauguin, vous jouez avec la lumière, et moi, je suis Filiger, et je peins l’Absolu."
Dès les premières manifestations symbolistes, autour de 1890, Filiger est associé aux expositions de cette nouvelle esthétique (Exposition des Peintres impressionnistes et symbolistes à la galerie Le Barc de Boutteville à Paris, Salon de la Rose+Croix à la galerie Durand-Ruel, Salon des XX à Bruxelles…), et y est vite remarqué, par la critique comme par ses confrères. Et outre l'influence qu'il exerce sur plusieurs d'entre eux, il se lie d'amitié avec des écrivains proches de ce courant novateur : Alfred Jarry publie en 1894 dans le Mercure de France le plus important article qu'il ait jamais consacré à un artiste, Remy de Gourmont lui demande des illustrations pour plusieurs de ses ouvrages, et Antoine de La Rochefoucauld assure pendant plusieurs années son soutien financier.
Après son départ du Pouldu en 1905, Filiger mène une vie errante et recluse en Bretagne, entre hospices et hôtels, finalement recueilli et soutenu par une famille bienveillante à Plougastel-Daoulas. Dans cet isolement, tandis que beaucoup le considèrent disparu depuis longtemps, il poursuit néanmoins ses recherches.
André Breton a probablement été attiré par l'œuvre de Filiger grâce à son intérêt pour Gauguin – qu'il classe parmi les peintres majeurs – et pour Alfred Jarry, auquel il consacre un article dès 1919, autour de son rôle d’"éclaireur" de l'art. Ayant acquis une première gouache de Filiger en 1949, l'écrivain collectionne ses œuvres jusqu'à la fin de sa vie, permettant ainsi leur diffusion dans son entourage surréaliste.
André Cariou, Historien d'art, Conservateur en chef du Patrimoine et ancien Directeur du Musée des Beaux-Arts de Quimper, est le commissaire de l'exposition. Il prépare parallèlement la publication du Catalogue raisonné de l'œuvre de Filiger ainsi qu'une édition commentée de sa correspondance (à paraître aux Éditions Locus Solus, mars 2019).
Des textes des historiens d'art Roland Recht et Jean-David Jumeau-Lafond apporteront leur analyse éclairante sur la place de l'œuvre dans le mouvement symboliste et plus largement dans l'art de la fin du XIXe et du début du XXème siècle.
L’exposition sera accompagnée d'un catalogue reproduisant chaque œuvre en couleurs. Poursuivant sa politique de soutien à un organisme de lutte contre le cancer, la galerie versera intégralement le produit de la vente du catalogue à l’association Vaincre le Cancer.