Après d'importants travaux de rénovation, la galerie Malingue consacre son exposition de ré-ouverture à Jean Hélion (1904-1987), et plus spécifiquement aux peintures de la décennie des années quarante, capitale dans son oeuvre. En effet, durant ces années, après être venu à structurer ses formes abstraites en Figures, vers 1938-1939, il développe une nouvelle réalité, autour de motifs emblématiques, tels les têtes d'hommes (Émile, Édouard, Charles), puis les "allumeurs", les "fumeurs", les "filles" et les "nus", et jusqu'aux premiers personnages de ses "scènes journalières" et aux objets (chapeaux, parapluies, oeillets…) de ses "natures mortes".
La décision d'Hélion d'abandonner l'abstraction pour mener à bien ses recherches figuratives a rencontré l'incompréhension de ses contemporains, et a peut-être masqué l'influence de sa démarche sur les œuvres d'artistes, notamment américains, qui lui ont succédé. Ainsi des travaux de certains protagonistes du Pop-Art (Jim Dine, Richard Lindner, Tom Wesselmann, Roy Lichtenstein, etc.), faisant écho aux formules visuelles mises au point par Hélion. Le 18 juin 1965, le critique d'art anglais Robert Melville affirmait d'ailleurs dans un article publié dans New Statesman, à propos de l'exposition Jean Hélion présentée aux Leicester Galleries: « il sera évident à quiconque visite les Leicester Galleries qu'Hélion est un des précurseurs majeurs [du Pop Art]. Il est très proche de l'esprit Pop dans certaines œuvres figuratives réalisées avant 1950 […]. » Les aspirations de ces artistes à rendre compte du monde moderne n'ont-elles pas rejoint les sujets de Hélion nourris du quotidien et des objets qui « habitent » l'environnement de ses personnages ?
Si des enquêtes approfondies restent à mener pour considérer les liens entre l'œuvre d'Hélion et des plus jeunes générations d'artistes, la galerie souhaite contribuer à évaluer à quel point Hélion fut un catalyseur de ce mouvement Pop. Il s'agit d'analyser avec un nouveau regard une production dont l'importance fut trop longtemps minorée, masquée par les recherches surréalistes et abstraites de cette même période.
Un catalogue reproduisant toutes les oeuvres de l'exposition sera publié. L'historien et critique d'art Philippe Dagen, auteur d'une importante monographie consacrée à l'oeuvre de Jean Hélion, contribue à la publication avec un long texte éclairant qui présente et analyse ces années cruciales pour l'artiste.
Poursuivant sa politique de soutien à un organisme de lutte contre le cancer, la galerie versera comme d'habitude intégralement le produit de la vente du catalogue à l'association Vaincre le Cancer, en vue de l'acquisition d'un important appareil d'étude.